Études

Le secteur radiophonique traverse aujourd’hui une transition technologique majeure. À l’horizon 2033, la bascule progressive de la FM vers le DAB+ redessine en profondeur les modes de diffusion. En parallèle, la présence devenue incontournable des radios sur le web via le streaming, les podcasts, les plateformes, les réseaux sociaux multiplie les canaux, mais aussi les impacts environnementaux associés.

Face à cette évolution rapide, les études d’impact récentes de l’Arcom, de l’Arcep, de l’Ademe, ainsi que le livre blanc de l’Arcom, ont posé les bases d’une réflexion de fond sur l’avenir de la radio. Mais un constat persiste : les données manquent encore cruellement, notamment sur les effets concrets de ces transformations pour les radios associatives, qui jouent pourtant un rôle essentiel dans la vie démocratique, culturelle et sociale des territoires. C’est pour répondre à ce manque que le projet Ondes Durables a été lancé. Engagées au printemps 2025, plusieurs études complémentaires seront menées simultanément.

Leur objectif est double :

• Identifier les principaux postes d’impact environnemental liés à l’activité des radios : équipements, production, diffusion (FM, DAB+, streaming IP), usages d’écoute…
• Co-construire, avec les équipes engagées, un plan d’action progressif, basé sur des leviers concrets de réduction.

Pour cela, le projet mobilise plusieurs outils scientifiques reconnus :

• Une modélisation approfondie des chaînes de diffusion, opérée par des chercheurs et chercheuses, afin de simuler les effets de différents usages et technologies.
• Des Analyses de Cycle de Vie (ACV), pour comparer finement les différents scénarios techniques (FM, DAB+, streaming IP…) et leurs impacts sur l’ensemble des équipements.
• Des Bilans Carbone®, pour quantifier les émissions de gaz à effet de serre générées à tous les niveaux (studios, antennes, cloud, mobilité, écoute…).

Ce croisement d’approches permet d’obtenir une vision fine, réaliste et concrète de l’empreinte écologique des pratiques radiophoniques associatives. Il s’agit autant d’objectiver les points de tension que d’identifier des leviers de transition concrets.

Mais au-delà des chiffres, c’est une démarche collective qui se dessine. Les études ne sont pas là pour imposer un modèle ou culpabiliser les acteur·rices : elles sont conçues pour outiller, éclairer et accompagner l’ensemble du secteur radiophonique associatif. L’ambition d’Ondes Durables n’est donc pas seulement d’évaluer, mais de transformer, en s’appuyant sur des données fiables, une écoute des réalités de terrain, et une envie partagée de faire évoluer les pratiques.

L’IETR – Un regard scientifique sur l’impact environnemental de la diffusion radio

L’Institut d’Électronique et des Technologies du numéRique (IETR), est le partenaire scientifique du projet Ondes Durables. L’équipe Vaader, localisée à l’INSA rennes, mène un travail de recherche approfondi sur l’ensemble de la chaîne de radiodiffusion, du studio jusqu’à l’auditeur.

Concrètement, l’IETR analyse les différentes étapes de production et de diffusion d’un programme radio (enregistrement, émission du signal, réception par le public), en tenant compte de tous les équipements techniques mobilisés à chaque maillon de la chaîne.

Cette étude s’appuie sur une modélisation complète des usages, intégrant différents scénarios d’écoute. Elle sera enrichie par une analyse de cycle de vie (ACV) de certains équipements et récepteurs, en complémentarité avec les travaux du bureau d’études Hubblo (voir ci-dessous).

Pilotée par Daniel Ménard, enseignant-chercheur dans le domaine des technologies du numérique, cette recherche s’inscrit dans un programme plus large d’évaluation environnementale des médias audiovisuels. Elle est menée en synergie avec le projet ESOS, soutenu par le plan France 2030, qui vise à développer une électronique à la fois soutenable et souveraine. Ces travaux sont portés par une équipe mêlant enseignant·es-chercheur·euses, étudiant·es en master et jeunes chercheur·euses, à travers des stages, une thèse de doctorat et des missions d’ingénierie.

Analyses de Cycle de Vie – ACV

L’Analyse de Cycle de Vie (ACV) est un outil reconnu d’évaluation environnementale. Elle permet de mesurer, de façon multicritère, les impacts d’un produit ou d’un service de sa conception à sa fin de vie : extraction des matières premières, fabrication, transport, utilisation, et élimination finale. Elle éclaire ainsi les décisions en prenant en compte l’ensemble des effets — visibles et invisibles — d’une activité.

Dans le cadre du projet Ondes Durables, cette méthodologie est mobilisée pour la première fois à l’échelle du secteur radiophonique associatif. L’objectif : identifier, comparer et mieux comprendre les impacts environnementaux liés à la production et à la diffusion de programmes radio. Grâce à cette ACV, Ondes Durables souhaite fournir aux radios — et à l’ensemble des parties prenantes — des repères fiables et partagés, pour faire des choix éclairés, éviter les fausses bonnes idées, et renforcer l’engagement écologique du secteur sans sacrifier ses missions sociales et culturelles.

Le cabinet indépendant Hubblo, spécialisé dans les ACV du secteur numérique, mène cette étude entre avril 2025 et janvier 2026.

Elle s’appuie sur :

• des inventaires précis d’équipements utilisés dans les studios et pour la diffusion,
• des entretiens avec les technicien·nes des radios partenaires,
• les résultats de Bilans Carbone® conduits parallèlement dans plusieurs structures,
• les données scientifiques issues des travaux de l’IETR (INSA Rennes / Université de Rennes),
• ainsi que sur les bases nationales de référence (études de l’Arcom, de l’ADEME, etc.).

Trois grands axes de travail s’en dégagent :

Bilan Carbone® : Prendre la mesure de son empreinte

Dans le cadre du projet Ondes Durables, quatre radios associatives – Radio Balises, Radio Boa, Graffiti et Radio Campus Angers – ont été volontaires pour réaliser leur Bilan Carbone®. Créé par l’ADEME et aujourd’hui porté par l’Association pour la transition bas carbone (ABC) – partenaire du projet, ce dispositif est reconnu pour sa rigueur méthodologique. Il permet de mesurer les émissions de gaz à effet de serre (GES) générées par une activité, et de construire un plan d’action pour les réduire.

Le Bilan Carbone® est bien plus qu’un simple calcul d’émissions : il constitue un point d’entrée stratégique pour accompagner les radios dans leur transformation écologique. Chaque radio participante bénéficiera d’une évaluation complète de ses postes d’émissions et d’un accompagnement individualisé pour identifier les leviers concrets de réduction. Ce travail permettra d’initier, à terme, un référentiel commun à l’échelle du réseau, adapté aux spécificités des radios associatives.

La réalisation des bilans est coordonnée par la CORLAB et la FRAP, avec l’appui d’un comité de pilotage associant les radios, des partenaires scientifiques (IETR), et des institutions publiques. Deux consultantes indépendantes – Marion Ser et Priscille Legros – mènent la mission sur le terrain, en étroite collaboration avec les équipes des radios. Toutes deux possèdent une solide expérience dans le secteur associatif et sont formées à la méthode officielle Bilan Carbone®. Déjà engagée auprès de l’ARRA – l’Assemblée Régionale des Radios Associatives, Marion Ser accompagne la fédération d’Occitanie dans la conception d’un calculateur d’empreinte environnementale et sociale nommé SONAR (Suivi et Observation Numériques de l’Adaptation des Radios). Cet outil sera notamment enrichi des données collectées dans le cadre d’Ondes Durables.

Les équipes salariées de la CORLAB et de la FRAP, formées à la méthode (module initiation), contribuent activement à la collecte des données, garantissant une démarche participative et pédagogique.

Les résultats individuels feront l’objet de restitutions pédagogiques auprès des radios concernées. Une restitution collective est également prévue pour mutualiser les apprentissages, partager les bonnes pratiques et nourrir le plaidoyer du projet à l’échelle nationale.

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